Sommes-nous toute.s des sadiques refoulé.es?
Ça peut paraître surprenant, mais d’après une étude sur la personnalité effectuée en Colombie Britannique, un peu plus de 50% d’entres nous présentent des traits de ‘sadisme ordinaire’. Ordinaire, dit-on? Tout à fait. Et ce de part la fréquence à laquelle on retrouve ce type de comportement dans les relations.
On en parle peu parce que les tendances médiatiques actuelles vont pousser la sévérité pathologique des comportements pervers narcissiques ou sociopathiques. Cela dit, on surligne ces extrêmes alors que bon nombre de ces comportements se retrouve sporadiquement en chacun de nous. Vous avez déjà ri après qu’un.e pote se prenne une gamelle, une porte? Eh oui!
Tout a un degré, ça ne veut pas dire que 50% d’entre nous sommes des ‘déviants’ ou des tueurs en série. Concrètement, en couple, ça se traduit par des blagues de mauvais goût, on se joue des mauvais tours, on va appuyer sur les ‘boutons sensibles’ de notre partenaire juste histoire d’obtenir une réaction immédiate, et c’est là qu’est le plaisir et la jouissance sadique!
Finalement… qui aime bien, châtie bien?
Nous revenons cette semaine vers François Renaud, sexologue et psychothérapeute, spécialisé en thérapie de couple à Montréal, il nous parle de ce qu’on appelle en psychologie le comportement ‘sadique ordinaire’.
*Si vous voulez voir les autres articles auxquels il a participé avec le Green Condom Club, voyez ici la codépendance affective, ici pour les libidos décalées, et ici pour les conseils aux nouveaux couples confinés ensembles!
GCC: Le comportement ‘sadique-ordinaire’, c’est quoi?
FR: Ce comportement est défini par de mauvaises intentions envers son amoureux.se dans le but de tirer un certain plaisir ou une certaine satisfaction.
Par exemple, quand on se dispute, il est très courant de faire preuve d’un certain sadisme, et de le faire de manière spontanée, à un moment où on se sent souvent justifié.e. On ne se perçoit pas soi-même forcément comme sadique, mais l’objectif est de blesser l’autre dans le feu de l’action.
Donc on ne parle pas d’un comportement inconscient, mais bel et bien conscient. On a aussi tendance à feindre l’ignorance de nos intentions et de la satisfaction qui en suit.
Faites-vous parfois certaines choses pour délibérément irriter votre partenaire, ou bien vous savez que cela l’irritera et vous le faites quand même (dommages collatéraux)?
Connaissez-vous les insécurités et les ‘boutons sensibles’ de votre partenaire qui le/la font réagir? Les avez-vous déjà utilisés?
Avez-vous déjà dit à votre partenaire: "Ce n’était pas mon intention de te blesser” sachant très bien que ce que vous avez fait ou dit allait le/la fâcher, ou blesser? Voilà, c’est ça du ‘sadisme ordinaire’!
GCC: Pourquoi et à qui ça arrive?
FR: Personne n’est à l’abri de ce type de comportement. C’est la nature humaine. Beaucoup d’entre nous prennent plaisir à le faire.
Tout comme un enfant va mordre son amie de la garderie car il a volé son jouet, ou un.e jeune adolescent.e qui veut rendre son amoureux.se jaloux.se pour “tester” l’attachement de la relation.
Les adultes ne sont malheureusement pas beaucoup plus matures…
Comme la réaction est immédiate et qu’on se sent justifié de le faire sur le moment, il est difficile d’arrêter. La satisfaction instantanée de ce type de comportement pèse souvent plus lourdement dans la balance que l’avantage à long terme de ne pas le faire.
C’est souvent un combat dans les relations: qui va avoir le dernier mot dans la dispute? Qui va gagner cette ‘bataille’?
GCC: Bon, donc, c’est normal… Mais est-ce que c’est sain?
FR: Soyons clair, il n’y a rien de sain dans ce type de comportement qu’on retrouve malheureusement trop souvent dans les relations.
Aussi, je vous vois déjà dire: "Moi, je ne fais pas cela”. Et c’est justement le gros problème de ce comportement: on ne veut pas se l’avouer et on ne veut pas reconnaître que notre partenaire nous le fait aussi, même quand c’est le cas.
Il suffit de se confronter soi-même plus de 3 minutes pour réaliser que nous avons pleins d’exemples de nous et notre partenaire en train de le faire. Il faut juste être honnête avec soi-même. Une fois ce comportement identifié, il faut faire le travail très difficile de renoncer à ce plaisir.
Pourquoi pensez-vous qu’il y a autant d’intimidation, de moquerie, de sarcasme, de ‘pranking’ entre collègues, ami.es et famille?
Les problèmes interpersonnels cachent régulièrement du sadisme ordinaire, et c’est pour cette raison qu’on réagit de manière si émotionnelle à ce type de dynamique: parce qu’on mind-map (perçoit) ces intentions conscientes chez l’autre et la satisfaction qui s’en retire.
En thérapie, quand on aborde le sujet, les couples sourient en coin comme s’ils avaient été pris la main dans le sac. Ils ne peuvent plus faire semblant du contraire, mais ils ne se sentent pas plus coupable pour autant.
C’est pour cette raison que les relations conflictuelles peuvent rapidement s’envenimer parfois même jusqu’à de la violence psychologique plus intense, voire physique.
Vous vous taquinez gentiment dans votre couple? Faites la différence!
Merci encore François, c’est toujours un plaisir d’avoir ton point de vue professionnel sur les questions de couple!
On l’aura compris, tout dans sa juste mesure. L’auto-dérision, taquiner son/sa conjointe, et le faire pour susciter une réaction drôle où on se donne la réplique de manière complice, même devant des amis ou de la famille, c’est différent que de chercher à humilier et dégrader l’autre!
Donc l’intention compte, ainsi que l’effet sur la personne en face. Ce n’est pas anodin et bénin si ce n’est pas un jeu consentant dans lequel entrent les deux partis sur un pied d’égalité.
Qui plus est, se taquiner et se charrier serait une des clés des couples qui durent! Sur ce, charriez-vous bien et avec bienveillance, et à la prochaine! ♥
À travers les âges, la sexualité est restée plus ou moins associée au fruit défendu, chargée de tabou et d'émotions négatives, rendant l'expression unique de notre sexualité indicible.